Les pépites de Talence

Les pépites de Talence

Le Pôle France Jeunes d’athlétisme handisport s’est installé au CREPS de Talence en septembre dernier avec neuf athlètes. Suivi sportif, social, scolaire, tout est mis en place pour que les athlètes de 14 à 22 ans s’épanouissent et pratiquent leur passion. Avec une petite idée de haut-niveau derrière la tête.

Déjà bien rempli, puisque de nombreux pôles jeunes valides ont élu domicile en Gironde depuis quelques années déjà, ainsi que le pôle France jeunes de basket fauteuil, le CREPS de Talence a donc ouvert ses portes à l’athlétisme pour une deuxième vie. En 2013, s’était en effet ouvert un Pôle à Lyon avec déjà l’idée de donner les moyens de s’entraîner et de poursuivre un cursus scolaire à des jeunes motivés. Mais la Fédération Française Handisport ayant la volonté de créer un véritable centre fédéral avec une unité de lieu pour plusieurs sports handisport, l’athlétisme a donc naturellement rejoint le basket fauteuil avant que la natation n’arrive à son tour en septembre prochain sur ce qu’on pourrait appeler à présent le « campus sportif de Talence ». Avec près de 330 jeunes d’horizons sportifs différents, cette ville où le fameux Décastar est organisé chaque année en septembre, respire le sport au quotidien à deux pas de sa grande sœur bordelaise.

Mais qui sont ces jeunes athlètes prêts à quitter famille, copians et région natale pour courir, sauter, lancer quotidiennement tout en laissant obligatoirement de la place aux cours la journée et autres devoirs le soir ? Jean-Baptiste Souche, entraîneur référent du groupe : « Cette année nous avons neuf athlètes, six garçons et trois filles, âgés de 14 à 22 ans. Deux sont mal voyants, deux infirmes moteurs cérébraux, quatre amputés inférieurs et un malentendant. Ils ont tous des profils de sprinteurs-sauteurs, sauf un demi-fondeur, avec des niveaux assez contrastés, ce qui fait la richesse de ce groupe, mais avec également une grosse motivation sportive et scolaire. Tout cela dans un contexte de mixité valide-handisport forcément enrichissant sans oublier l’idée du plaisir de la pratique ».

Apparemment logique, ce plaisir pourrait pourtant ne pas couler de source. Il n’est pas forcément simple en effet de rester toute la semaine, voire le week-end pour certains, dans une même structure avec toujours les mêmes visages, à répéter tous les soirs les mêmes habitudes sportives. Mais après-tout, l’envolée vers le haut-niveau ne passe-t-elle pas obligatoirement par-là ? « Ce n’est pas une histoire de haut-niveau, coupe Jean-Baptiste Souche, mais avant tout un projet personnel que le jeune athlète a en lui. Il s’agit de bien connaître la motivation de l’athlète, de savoir comment il se projette, comment il compte devenir acteur de sa présence parmi nous. Quand nous recevons le jeune et sa famille, il faut qu’il y ait une cohérence sportive, scolaire, personnelle sinon ça ne marche pas ».

Si certains athlètes ont été détectés lors de différentes compétitions, rassemblements, stages et invités à intégrer le Pôle, d’autres peuvent en faire la demande. Tous les ans (la dernière session a eu lieu les 24, 25 et 26 février derniers), un week-end de détection est proposé à tout athlète désirant se donner les moyens de progresser en athlétisme. Des temps d’entraînements, d’entretiens sont consacrés à chacun puis le choix d’intégrer ou non l’athlète se dessine. « Ce week-end est ouvert à tous car nous n’avons pas non plus une très grosse densité d’athlètes sur l’ensemble du territoire, il faut donc encourager les jeunes à se présenter, explique l’entraîneur référent. Nous devons avoir des critères larges d’acceptation si le jeune est motivé, même si au départ il n’est pas encore très performant. C’est aussi le moyen de voir arriver quelqu’un qui est passé à travers les mailles du filet de la détection. Mais en même temps, si nous estimons que le jeune a des conditions d’entraînement satisfaisantes dans son club, il n’y a pas de raisons de l’enlever de sa structure où le travail est bien fait ».

A raison d’un entraînement par jour en semaine après les cours, le groupe se prépare sereinement à la saison qui approche. Certains font un peu plus le week-end ou le matin avec l’accord du coach, mais chacun le fait à son rythme avec l’idée de franchir les étapes qui lui sont propres. Des records personnels à faire tomber, mieux connaître son corps et ses capacités, une première compétition Elite, un titre national, une sélection en équipe de France. La certitude est que l’avenir de l’athlétisme français passe notamment par le Pôle de Talence qui espère 12 à 15 athlètes en moyenne chaque année avec une forte proportion de 14-18 ans d’ici deux ans. Les Jeux Paralympiques de 2024 se préparent dès maintenant et certaines des pépites espérées à Paris pourraient bien être polies sur les bords de la Gironde /// Renaud Goude.


Valentin Bertrand, 22 ans, hémiplégique, spécialités : 400m et longueur, Master école de commerce
« Je suis un peu le papy de la bande mais je me plait bien avec ce groupe en majorité de 14-18 ans. Le fait d’être au contact de sportifs valides pratiquants d’autres sports, c’est très sympa aussi. C’est ma quatrième année au Pôle, j’étais à Lyon et je suis venu à Talence cette année. J’ai suivi Jean-Baptiste Souche avec qui je m’entends très bien, et en plus j’ai eu la possibilité d’intégrer une école de commerce près du Pôle donc j’ai rapidement fait le choix de quitter Lyon. Je m’entraîne huit fois par semaine, tout est structuré, organisé, c’est pratique. Concilier athlétisme et études, c’est une question de rythme à prendre. J’ai déjà connu l’équipe de France et les Jeux à Rio en 2016, je veux encore progresser et devenir meilleur. Je prends les années les unes après les autres mais je sais où je veux aller ».

Gwénaïg Le Vourc’h, 14 ans, mal voyante, spécialités : 100m, 200m et longueur, 3e au collège
« C’est ma première année au Pôle, j’ai été invitée à y entrer lors du week-end de détection de février 2017. Etre à Talence pour moi c’est la possibilité de pratiquer ma passion et de vivre mon rêve d’être présente en 2024. Mon modèle c’est Nantenin Keita, championne paralympique du 400m mal voyant en 2016. Je suis en 3e dans une classe avec d’autres sportifs du CREPS. L’ambiance est bonne. Parfois le temps peut être un peu long, notamment le week-end, mais je sors un peu tout de même avec les autres qui restent sur place, ou bien je lis car j’adore la littérature. Je rentre chez moi à Saint-Renan, dans le Finistère, à toutes les vacances et mes parents sont forcément heureux de me revoir. Ils me soutiennent dans mon projet, quand je repars ils savent pourquoi et m’encouragent. Ca fait plaisir ».

Les autres athlètes du Pôle France :
Thomas Noel, 21 ans, sourd, sprinteur
Alexandre Lloveras, 17ans, mal voyant, demi-fondeur, Terminale S
Maxime Beugnet, 16 ans, amputé tibial, sprinteur-sauteur, 2nde spécialité chaudronnerie
Yanis Dumas, 16 ans, amputé tibial, sprinteur-sauteur, 2nde Bac pro commerce
Lara Tikunova, 15 ans, amputée fémorale, sprinteuse-sauteuse, 2nde générale
Clémence Gelineau, 16 ans, amputée tibiale, sprinteuse-sauteuse, en 1re L
Marouane Majdoub, 18 ans, paralysé cérébral, sprinteur-sauteur, en IME formation accueil

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